L’estime de soi

Extrait de l’ouvrage de Marcelle Thibaudeau, « La première entrevue en psychothérapie » :

La 1re entrevue

« Le degré d’estime de soi est un quelque sorte le corolaire de la qualité du lien établi entre l’enfant et ses parents.

C’est en fait à partir de la qualité de ce lien que chacun se construit une image mentale de ce qu’il est et une autre image de ce qu’il devrait être, ou encore de ce qu’il croit qu’il devrait être. Cette dernière image, on la nomme image idéale du moi.

Le degré de concordance entre l’image de soi et l’image idéale mesure le degré de l’estime de soi. Moins l’écart est grand entre ces deux images, plus l’estime de soi est élevée, et inversement, quand l’écart est grand entre les deux, l’estime de soi est basse.

L’image de soi s’appuie-t-elle sur des réalisations qui rassurent sur la capacité de satisfaire ses besoins fondamentaux et de faire face aux problèmes courants de la vie, elle a des chances d’être objective et relativement stable. Et si, parallèlement, l’image idéale repose sur une raisonnable appréciation de ses aptitudes, de ses talents, légitimant la poursuite de buts conformes a ses intérêts et à ses goûts, on peut alors parler d’équilibre entre l’image de soi et l’image idéale. Et il en résulte un haut degré d’estime de soi.

Mais si l’image de soi est basée en grande partie sur l’opinion d’autres personnes ou sur celle qu’on leur attribue, alors elle peut être sensiblement déformée et même fantasmatique. Par conséquent, l’image idéale de soi est alors le reflet des attentes de ces personnes au sujet de soi ou de celles qu’on leur suppose. Et dans la mesure où la sécurité affective dépend de ces personnes, les conduites sont plus ou moins faussées. On n’agit alors pas toujours selon ses tendances et dans ses propres intérêts. On peut même en arriver à renoncer à ses aspirations ou à poursuivre des buts n’ayant rien à voir avec elles et qu’au fond on ne désire pas vraiment atteindre. Les déboires qui parfois s’ensuivent le prouvent bien.

Lorsque le désir de plaire ou de ne pas déplaire, non seulement aux personnes significatives de sa vie, mais aussi à leurs substituts, supplante le désir de se plaire à soi d’abord, on en acquiert une réputation de gentillesse mais on ne commande pas le respect et on s’expose à différentes formes d’exploitation dont, en dernière analyse, on est responsable, sans en être conscient.

En outre, on dépend pour le maintien de l’estime de soi de témoignages rassurants provenant de sources extérieures. La régularité et la suffisance de ces apports extérieurs n’étant jamais garanties, l’estime de soi est fragile et précaire. D’inévitables frustrations produisent de vagues sensations de fatigue, d’irritation, des symptômes psychosomatiques combinés avec des états dépressifs sporadiques. Si les apports rassurants viennent à manquer totalement, l’estime de soi chute au point zéro et entraîne une dépression souvent accompagnée de pensées suicidaires. »